Sexe, genre, orientation : comprendre le continuum SOGIESC pour mieux défendre les droits LGBTQ+

Dans un contexte où les discours anti-genre, transphobes et homophobes regagnent du terrain en Europe et ailleurs, il est plus que jamais essentiel de revenir aux fondamentaux. Comprendre ce que recouvrent les termes « sexe », « genre », « orientation sexuelle » ou encore « SOGIESC » n’est pas un luxe intellectuel : c’est une nécessité pour une meilleure compréhension et acceptation de la diversité humaine. En tant qu’écrivain public et militant queer, je vous propose ici de mieux appréhender les enjeux derrière ces mots. Parce qu’à travers les mots, ce sont des identités, des droits et des vies qui sont en jeu.

Sexe : au-delà de la binarité

Le sexe biologique : un continuum plus qu’une case

Contrairement à une idée reçue très répandue, le sexe biologique n’est pas un absolu binaire. Il se construit à travers plusieurs niveaux : chromosomes, hormones, caractères sexuels primaires et secondaires. Et sur chacun de ces niveaux, la variabilité existe.

Les caractères sexuels primaires

Chez le sexe masculin

  • la verge ;
  • les testicules, glandes sexuelles masculines qui produisent les spermatozoïdes et des hormones sexuelles, dont la testostérone ;
  • les organes internes, comme
    • la prostate ;
    • les vésicules séminales.

Chez le sexe féminin

  • les lèvres ;
  • le vagin ;
  • les organes internes, comme
    • les ovaires ;
    • les trompes ;
    • l’utérus.

Les caractères sexuels secondaires

Chez le sexe masculin

  • l’apparition des poils axillaires ;
  • l’apparition des poils au niveau du visage (la barbe et la moustache) ;
  • la mue de la voix, due à une modification du volume du larynx ;
  • la hausse de la musculature ;
  • l’augmentation du volume testiculaire et des dimensions de la verge.

Chez le sexe féminin

  • l’apparition des poils pubiens ;
  • l’apparition des poils axillaires ;
  • le développement de la poitrine et des capacités de sécrétion lactée ;
  • l’apparition des cycles menstruels avec les règles.
Dessin en ligne noire d'un homme nu saluant avec la main droite et d'une femme nue debout, représentant l'humanité sur la plaque de la sonde spatiale Pioneer.
Représentation d'un homme et d'une femme de la plaque Pioneer - NASA

Intersexuation : une réalité méconnue

1.7% des bébés naissent avec des caractéristiques sexuelles qui ne correspondent pas aux normes strictes de mâle ou femelle. Ces individus sont dites intersexuées. On parle aussi d’intersexuation. Les termes « intersexualité » et « hermaphrodisme » ne sont pas adéquats pour décrire ces situations.

La science nous dit que le seul niveau strictement binaire, ce sont les gamètes (ovules ou spermatozoïdes). Pour le reste, nous sommes dans un spectre, car plus de deux variantes existent pour toutes les autres caractéristiques sexuelles.

Pourtant, en Suisse comme dans de nombreux pays, l’état civil n’offre que deux options à la naissance : masculin ou féminin. Cette réduction binaire repose le plus souvent sur l’apparence des organes génitaux externes, ignorant le fait que ces derniers proviennent tous d’une structure indifférenciée commune jusqu’au deuxième mois de vie intra-utérine.

Genre : une construction sociale et politique

Genre n’est pas sexe

Le genre renvoie à l’ensemble des rôles, attentes et représentations sociales liés au sexe assigné à la naissance. Il est donc historiquement et culturellement situé.

Le genre a des dimensions multiples, dont deux sont essentielles pour comprendre la diversité arc-en-ciel.

Identité de genre : ce que je suis

L’identité de genre est un ressenti intime, profond, qui émerge en moyenne entre 8 et 10 ans. On peut ressentir son identité de genre comme étant masculine, féminine, sans genre du tout, ou encore située entre ces deux extrêmes. Ce n’est ni un choix, ni une mode, ni une lubie.

Cette phase de prise de conscience de son identité de genre est appelée coming-in. Il peut y avoir un délai plus ou moins long jusqu’à un éventuel coming-out, c’est-à-dire le moment où la personne en parle à d’autres.

Quand l’identité de genre d’une personne est congruente avec son sexe assigné à la naissance, on la qualifie de personne cisgenre. Si l’identité de genre est incongruente avec son sexe d’assignation, la personne peut être considérée comme transgenre ou trans.

Cela concerne 1 à 2% de la population. L’incongruence de genre peut générer une souffrance psychique diagnostiquée alors sous le nom de dysphorie de genre, une souffrance psychique légitimement reconnue.

Expression de genre : ce que je montre

Comportements, attributs (vêtements, bijoux, etc.), actions conscientes ou non, rôles socialement définis comme féminins, masculins, androgynes ou autres : l’expression de genre est une manifestation publique et partiellement contrôlable. Elle peut ou non être alignée avec l’identité de genre ou le sexe assigné.

Pourquoi ça gêne ?

Ces codes culturels varient énormément selon les peuples et les époques. L’expression de genre est donc fluide et ne correspond pas forcément à ce qui est attendu en fonction de l’identité de genre ou du sexe de la personne. Toute personne qui sort des normes de genre attendues s’expose à des violences : sexisme, homophobie, transphobie. Le genre, c’est donc aussi un outil de pouvoir.

Les personnes trans ou non binaires peuvent adapter leur expression de genre ou souhaiter modifier leurs caractéristiques sexuelles afin de les mettre en congruence avec leur identité de genre. Une éventuelle dysphorie s’en trouve alors réduite ou éliminée.

Orientation sexuelle : l’attirance est plurielle

L’orientation sexuelle : une boussole complexe

Elle est un spectre mouvant, pas une étiquette figée, qui comprend plusieurs dimensions :

  1. Attirance affective ;
  2. Attirance sexuelle ;
  3. Genre des partenaires ;
  4. Auto-identification comme personne hétérosexuelle, homosexuelle, bisexuelle, pansexuelle, asexuelle, etc.

Les termes d’attirance affective et attirance sexuelle sont utilisés à la fois alternativement et simultanément et sont basés sur la perspective selon laquelle l’attirance sexuelle n’est qu’un élément unique d’une dynamique plus large.

Ce n’est pas un choix

L’attirance affective et l’attirance sexuelle apparaissent généralement avant et indépendamment des premiers rapports sexuels. Le processus de reconnaissance de soi est appelé coming-in. Il peut durer des années et précède un éventuel coming-out. Elle ne résulte ni d’un choix ni d’une préférence.

Les attirances influencent l’auto-identification, mais les choix relationnels ne sont ni linéaires, ni strictement prévisibles. Certains individus ont des relations avec des partenaires en dehors de leur orientation déclarée, selon leur vécu, contexte ou environnement social.

Rompre avec les catégories fixes

Cette complexité souligne l’importance de considérer l’orientation sexuelle comme un spectre dynamique plutôt qu’une série de catégories fixes. On observe l’émergence de plusieurs orientations sexuelles (pansexuel, asexuel, bisexuel, lesbienne, gay, homosexuel…) qui permettent de mieux refléter la diversité des attirances humaines. Et c’est tant mieux.

Couple gay se tenant tendrement l’un l’autre, front contre front, lors de leur mariage en plein air entouré de nature verdoyante
Photo de Ashley Nicole sur Unsplash

LGBTQ+ vs SOGIESC : Choisir les mots et les luttes?

LGBTQ+ : une bannière politique

Le sigle LGBTQ+ désigne l’ensemble des personnes issues de minorités sexuelles et/ou de genre. Il regroupe :

  • les lesbiennes (L) ;
  • les gays (G) ;
  • les personnes bisexuelles (B) ;
  • les personnes transgenres (T) ;
  • les personnes queers ou en questionnement (Q).

Il existe d’autres dénominations pour désigner la communauté comme LGBTQIA+, LGBTQIAAP+, LGBTQI2SA+ ajoutant d’autres identités :

  • les personnes intersexes (I) ;
  • les personnes asexuelles ou aromantiques (A) ;
  • les personnes agenres (A) ;
  • les personnes pansexuelles (P) ;
  • les personnes bispirituelles (2S) ;

Ces acronymes regroupent des identités minorisées, unies par des luttes contre la norme hétéro-cis-patriarcale. C’est un sigle militant, porteur de revendications et de visibilités. Le sigle LGBTQIA+ est avant tout résolument politique et intrinsèquement lié à la lutte pour les droits de la communauté. Les expériences de vie et les réalités des personnes homosexuelles, transgenres et intersexes sont toutes très différentes, mais elles ont toutes pour dénominateur commun le fait d’être victimes d’un même rejet de la part de la société.

Mais ses limites existent

L’ajout incessant de lettres, la non-inclusion de certaines identités culturelles, comme les personnes bispirituelles, demi-genres, non binaires, peuvent produire l’effet inverse : une impression de fragmentation, voire d’exclusion. D’autres termes continueront probablement à évoluer au fur et à mesure que de plus grandes libertés sociales permettront l’exploration et l’articulation de différentes orientations sexuelles et identités de genre.

Le terme LGBTQ a le mérite d’englober un large éventail de catégories et d’identités liées à la sexualité et au genre. Mais les qualités changeantes de ce terme font que LGBTQ n’est pas adapté à la pratique du droit, qui exige davantage de clarté, de précision et de stabilité. Ainsi, l’abréviation LGBTQ+ a récemment commencé à se retourner contre elle.

Il est également problématique que l’ajout constant de catégories nouvelles, peu familières et souvent plus étroites, finisse par éloigner la discussion de l’universalité qui est au cœur de tous les droits humains, plutôt que de la favoriser. L’utilisation de l’abréviation LGBTQ+ peut en fait finir par renforcer l’idée d’altérité en créant une prolifération de petits groupes discrets perçus comme séparés de la population générale

Manifestation LGBTQ+ avec des pancartes Amnesty International affichant le message 'Love is a human right', des drapeaux arc-en-ciel et des participant·es portant des t-shirts militants.
Photo de Ian Taylor sur Unsplash

SOGIESC : vers une approche universelle

L’acronyme SOGIESC (Sexual Orientation, Gender Identity and Expression, Sex Characteristics ou Orientation sexuelle, Identité & Expression de genre, et Caractéristiques sexuelles) se développe dans le champ du droit international. Il met l’accent sur les dimensions que toutes les personnes possèdent, pas seulement les minorités.

Un réencadrement salutaire

SOGIESC permet de penser la protection juridique et les droits humains sur une base inclusive, stable et universelle. Ce n’est pas un remplacement du militantisme LGBTQ, c’en est le prolongement stratégique.

La formulation alternative de SOGIESC offre un antidote à bon nombre de ces dilemmes. Elle met l’accent non plus sur des populations spécifiques, mais sur des traits communs plus profonds. L’acronyme SOGIESC inclut désormais l’« expression de genre », qui est tournée vers l’extérieur, contrairement à l’identité de genre vécue intérieurement par une personne. Enfin, le terme a été complété par les « caractéristiques sexuelles », liées aux classifications conventionnelles en tant que mâle ou femelle.

L’abréviation LGBTQIA+ reflète cet engagement louable en faveur de la diversité et de l’inclusion, et elle a encore un rôle à jouer. Mais, pour la défense des droits de la personne, en politique et en droit, SOGIESC offre une option précieuse qui garantit la précision, l’inclusion et l’accent mis sur des caractéristiques universellement partagées.

Nommer, comprendre, lutter

Nommer les choses, c’est déjà lutter. Clarifier les concepts de sexe, de genre, d’orientation et d’appartenance, c’est armer la pensée contre l’ignorance, l’intolérance et la haine.

Le schéma interactif de la triade Sexe, Genre et Orientation est un outil de l’Université de Genève qui, bien que sommaire, offre une projection claire et adéquate de la diversité SOGIESC. À l’exception du premier bandeau, où les choix sont souvent basés sur des tests médicaux, la personne elle-même définit les curseurs des autres, car l’autodétermination prime sur la catégorisation.

En tant qu’écrivain public et militant queer, je crois que les mots sont des outils puissants de transformation.

Schéma explicatif de la triade sexe, genre et orientation, illustrant les dimensions biologiques, identitaires et relationnelles, avec des curseurs représentant la diversité du développement sexuel, de l'identité de genre, de l'expression de genre et des attirances affective et sexuelle.

Sources

Orientation sexuelle et identité de genre – Page d’accueil. (2024, 13 février). Orientation Sexuelle et Identité de Genre. https://www.coe.int/fr/web/sogi

Sexual orientation and gender identity – Homepage. (2024, 13 février). Sexual Orientation And Gender Identity. https://www.coe.int/en/web/sogi

TRIADES SEXE, GENRE, ORIENTATION – Sciences, sexes, Identités – UNIGE. (2023, 23 octobre). https://www.unige.ch/ssi/ressources/ressources-externes/triade-sexe-genre-orientation/

From LGBTQIA+ to SOGIESC : Reframing sexuality, gender, and human rights. (s. d.). OpenGlobalRights. https://www.openglobalrights.org/lgbtqia-to-sogiesc-reframing-sexuality-gender-human-rights/

Bernard, I. (2020, 7 mai). Caractères sexuels primaires Homme-Femme : définition, liste. https://sante.journaldesfemmes.fr/fiches-anatomie-et-examens/2634593-caracteres-sexuels-gonades-primaires-secondaires-homme-femme-definition-liste/

Contributeurs aux projets Wikimedia. (2025b, mars 11). Distinction entre sexe et genre. https://fr.wikipedia.org/wiki/Distinction_entre_sexe_et_genre

Contributeurs aux projets Wikimedia. (2024, 24 janvier). Grille d’orientation sexuelle de Klein. https://fr.wikipedia.org/wiki/Grille_d%27orientation_sexuelle_de_Klein

Contributeurs aux projets Wikimedia. (2024b, mai 5). Orientation romantique. https://fr.wikipedia.org/wiki/Orientation_romantique

Contributeurs aux projets Wikimedia. (2025a, janvier 12). Sexe. https://fr.wikipedia.org/wiki/Sexe

Maurice. (2024). Le Petit guide LGBTQIA+ : Découvrez l’histoire, la culture et les identités queers. First.

Biologie et identité de genre. (s. d.). Santé Sexuelle Suisse. https://www.sante-sexuelle.ch/themes/caracteristiques-sexuelles-et-identite-de-genre

Combien y a-t-il de sexes ? (s. d.). CNRS le Journal. https://lejournal.cnrs.fr/articles/combien-y-a-t-il-de-sexes

Ce texte reflète mon engagement : écrire avec justesse sur des enjeux de société.

Je suis Grégoire, fondateur de Grédaction — Écrivain public x IA. J’aide les institutions, les professionnels et professionnelles, les créateur et créatrices de contenu à donner à leurs textes une voix claire, inclusive et cohérente avec leurs valeurs.

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